Discours de Marlihan Lopez à l’inauguration de la nouvelle plaque à la Place du 6-décembre-1989
09 DÉCEMBRE 2019
Le 5 décembre 2019, Marlihan Lopez, vice-présidente de la Fédération des femmes du Québec était inviter à s’exprimer à l’occasion de l’inauguration de la nouvelle plaque à la Place du 6-décembre-1989. Voici le discours qu’elle a prononcé :
Cette année, la campagne des 12 jours d’action contre les violences faites aux femmes, coordonnée par le Comité 12 jours a lieu du 25 novembre au 6 décembre. Notre campagne rappelle à quel point il est crucial de prendre ce moment de recueillement à chaque année pour se souvenir des 14 femmes qui furent assassinées le 6 décembre 1989 à Polytechnique.
30 ans plus tard, cette date est devenue la Journée nationale de commémoration et d’action contre les violences envers les femmes. Ce moment de recueillement est incontournable parce qu’il nous rappelle à nos responsabilités 30 ans plus tard.
Car oui, 30 ans plus tard, le Comité 12 jours vous demande mais quelles différences ?
Quelles différences quand le premier féminicide, soit le génocide colonial des autochtones, n’est toujours pas reconnu ?
1017. C’est le nombre de femmes autochtones assassinées et disparues depuis plus de 30 ans selon les sources officielles. C’est une sous-estimation.
4 000. C’est le nombre de femmes autochtones assassinées et disparues selon les organismes de terrain. Ce serait aussi une sous-estimation.
Évitons que la mémoire ne nous fasse défaut.
Quelles différences en 2019 quand les femmes en situation de handicap ne sont écoutées que pour vous permettre de rajouter une note de bas de page dans vos statistiques ? Quelles différences lorsque le système ne les inclut toujours pas ?
Évitons que la mémoire ne nous fasse défaut.
Quelles différences en 2019 quand les voix et les expériences des femmes racisées sont toujours mis de côté si ce n’est pour mettre de l’avant une vitrine antiraciste dans une société où le racisme systémique règne ? Quelles différences quand nous les écoutons qu’au bénéfice de notre bonne conscience ?
Évitons que la mémoire ne nous fasse défaut.
Quelles différences en 2019 quand les hommes qui parlent de voile sont plus écoutées que les femmes qui parlent de viol ? Quelles différences ?!
Évitons que la mémoire ne nous fasse défaut.
Si nommer les violences est une étape nécessaire pour éduquer et enrayer les violences faites à toutes les femmes, il y a urgence d’agir pour toutes celles qui résistent encore.
En tant que représentante du Comité 12 jours et en tant que femme, je me retrouve aujourd’hui debout devant vous et peinée par l’assassinat des 14 femmes le 6 décembre 1989 à Polytechnique. Je me retrouve aujourd’hui avec la rage au ventre pour toutes celles qui ont péri en raison des violences et pour toutes celles qui malheureusement sont encore oubliées.
Les membres du Comité 12 jours n’ont pas le luxe de vivre sans être affectées chaque jour par des violences. Les membres du Comité 12 jours n’ont pas le luxe de vivre en ayant la possibilité de regarder ailleurs alors que des femmes sont toujours victimes de violence.
C’est pourquoi le Comité 12 jours continuera de faire de l’éducation et de la sensibilisation inconfortable. C’est pourquoi le Comité 12 jours demande à tous les décideurs politiques de passer à l’action et de s’engager résolument pour enrayer les violences faites à toutes les femmes. Cela passe par un financement adéquat des organismes communautaires sur le terrain notamment celles qui interviennent auprès des femmes les plus vulnérables.
14 femmes furent assassinées en 1989. 30 ans plus tard, Dona Paré is still missing.
30 ans plus tard croyez nous aussi !
Discours co-rédigé par Claire-Anse Saint-Éloi et Pauline Ou-halima